Un nouveau cycle quinquennal d'évaluation de la littérature du Giec touche lentement à sa fin. Plusieurs réunions physiques ont été annulées en raison de l’épidémie de Covid-19, les scientifiques ont travaillé de façon globalement erratique pendant presque trois ans, et les auteurs et les délégués ont eu besoin de deux fois plus de temps que prévu pour obtenir l'approbation : mais finalement, la partie « Atténuation du changement climatique » du groupe de travail III de la sixième évaluation du Giec a été approuvée. Il y a de mauvaises nouvelles, de bonnes nouvelles et beaucoup de choses sur lesquelles la communauté climatique peut travailler.
La plus mauvaise nouvelle est que les émissions de gaz à effet de serre de toutes sortes continuent d'augmenter, ce qui rend l’atteinte de l'objectif de 1,5°C de réchauffement toujours plus hypothétique. La pandémie de Covid-19 n'a pas déclenché le changement systémique espéré dans l'utilisation d'énergies à forte intensité de GES, par exemple grâce au télétravail. Les contributions déterminées au niveau national (CDN) existantes, avant et après les annonces faites lors de la COP 26 à Glasgow, conduisent à un dépassement de l'objectif de 1,5°C et probablement même de 2°C. Alors que les énergies renouvelables sont très populaires dans la plupart des régions, l'élimination progressive nécessaire des combustibles fossiles est extrêmement controversée, et il existe un désaccord mondial important sur la bioénergie, les combustibles fossiles avec capture et stockage du carbone (CSC) et le nucléaire. Enfin, les flux financiers suivis sont bien en deçà des niveaux nécessaires pour atteindre les objectifs d'atténuation.
Mais il y a également de nombreuses raisons d'être optimiste. Depuis la COP 21 et l'Accord de Paris en 2015, les politiques climatiques se sont considérablement améliorées, en termes de sérieux. Les coûts de nombreuses technologies clés de l'offre et de la demande d'énergie ont beaucoup diminué, tandis que leur efficacité s'est renforcée, par exemple l'énergie éolienne, l'énergie solaire photovoltaïque, l'énergie solaire à concentration, les batteries mobiles et stationnaires et les pompes à chaleur, ce qui a entraîné une croissance exponentielle de leur utilisation. Dans tous les secteurs, l'accent est mis sur la demande et sur les options d'efficacité en matière de gaz à effet de serre pour compléter l'efficacité énergétique, le changement de combustible et la gestion du carbone. Tous les secteurs disposent des moyens technologiques et comportementaux nécessaires pour réaliser immédiatement des progrès significatifs et atteindre zéro émission nette au début des années 2050. La politique d'atténuation, qu'il s'agisse de réglementations ou d'une tarification à l'équivalent de 100 $/tCO2 ou moins, pourrait éliminer la moitié des émissions mondiales de 2019 d'ici à 2030. L'élimination de la combustion de combustibles fossiles à proximité des populations présente également des avantages considérables pour la santé et la qualité de l'air local, ainsi que pour la sécurité énergétique.
Le développement durable est impossible sans une atténuation accélérée du changement climatique. Les trajectoires de développement durable exigent une approche de la politique climatique qui tienne compte de toutes les parties prenantes et de tous les niveaux de juridiction. Les conditions favorables comprennent le financement, l'innovation technologique, le renforcement des instruments politiques, la capacité institutionnelle, la gouvernance à plusieurs échelles et les changements dans les comportements et les modes de vie humains.
Compte tenu du rythme de l'atténuation, un certain niveau d'élimination naturelle et technologique du dioxyde de carbone (carbon dioxyde removal en anglais, CDR) est probablement inévitable, mais il existe des risques substantiels en termes de permanence, de coûts et d'institutions.
Dans l'ensemble, cependant, la faisabilité technique et politique de l'atténuation est plus élevée qu'elle ne l’a jamais été. La question est de savoir à quelle vitesse cela peut se produire, et quels dommages nous pouvons subir collectivement dans l'intervalle.