Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, organise le 20 septembre le Sommet sur l'ambition climatique en marge de l'Assemblée générale des Nations unies à New York. Au cours d'une année charnière pour le bilan de l'action climatique, cet événement vise à fixer des repères mondiaux pour informer les engagements et stimuler la mise en œuvre par les pays, les entreprises et les institutions financières internationales.
Dans la continuité de son prédécesseur Ban Ki Moon, qui avait convoqué un sommet de l'ONU sur le climat en 2014 pour soutenir la mise en place de ce qui allait devenir l'Accord de Paris un an plus tard, Antonio Guterres joue un rôle clé dans la diplomatie climatique internationale. Alors que le Sommet de l'action climatique 2019 se contentait d'appeler tous les pays, entreprises et villes à actualiser et à renforcer leurs engagements avant l'échéance de 2020 fixée par les cycles quinquennaux d'ambition de l'Accord de Paris et d'applaudir la vague d'engagements vers zéro émission nette, le Sommet de l'ambition climatique 2023 va plus loin. Il consolide le rôle du secrétaire général dans sa critique virulente de l'écoblanchiment et sa défense d'une plus grande transparence, d'une plus grande responsabilité et d'une plus grande intégrité environnementale, en s'appuyant sur le rapport lancé lors de la COP 27 et judicieusement intitulé Integrity Matters (« L'intégrité compte »).
À quoi peut-on s'attendre ?
Le sommet vise à placer la barre très haut en matière d'ambition en n'autorisant à monter à la tribune que ceux qui peuvent démontrer qu'ils sont les premiers à agir et les meilleurs de leur catégorie. Il s'articule autour de trois axes : l'ambition, la crédibilité et la mise en œuvre.
Le terme « ambition » signifie que l'on appelle les gouvernements à renforcer leurs contributions déterminées au niveau national (CDN) existantes et à s'engager à ce que leurs prochaines CDN, attendues d'ici 2025, fixent des objectifs ambitieux jusqu'en 2035 qui mettront le monde sur la voie de 1,5°C. Le déficit d'ambition actuel est évident : pour avoir une chance sur deux d'atteindre 1,5°C sans dépassement ou avec un dépassement limité, il faut réduire les émissions de 2019 de 42 % d'ici à 2030 et de 60 % d'ici à 2035, selon le rapport de synthèse du sixième rapport d'évaluation du Giec. Les engagements actuels ne les réduisent que de 0,3 % par rapport aux niveaux de 2019 d'ici à 2030, selon le dernier rapport de synthèse sur les CDN. Au-delà des grands objectifs, les gouvernements sont également encouragés à présenter des plans ambitieux en matière de transition énergétique et d'adaptation au changement climatique, à confirmer l'annonce du dialogue de Petersberg selon laquelle l'objectif de 100 milliards de dollars fixé en 2009 sera effectivement atteint en 2023, et à encourager de nouvelles promesses en faveur du deuxième cycle de reconstitution du Fonds vert pour le climat (actuellement bloqué à mi-parcours).
La « crédibilité » est un appel direct aux entreprises, aux villes, aux régions et aux institutions financières pour qu'elles s'engagent à réduire réellement leurs émissions et leur dépendance à l'égard des mécanismes de compensation du carbone, comme le préconise le rapport de 2022 commandé par le secrétaire général des Nations unies, et pour qu'elles prennent en considération l'impact de leurs produits et de leurs activités sur le climat. Ces acteurs sont également recrutés pour soutenir un appel clair à l'élimination progressive des combustibles fossiles, qui devrait être le thème principal de la COP 28.
La « coopération » requiert, de la part des acteurs publics et privés, un renforcement des partenariats et des coalitions existants afin d'assurer une mise en œuvre effective sur le terrain, en particulier pour les secteurs à fortes émissions dont les produits sont très échangés (acier, ciment, agriculture) ou les mécanismes de coordination internationale (énergie, aviation, transport maritime). Le Breakthrough Agenda Report 2023 récemment publié par l'Agence internationale de l'énergie (AIE), l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) et les champions de haut niveau des Nations unies pour le changement climatique donne précisément des recommandations aux pays sur la manière de faire progresser la coopération sectorielle afin de réduire les émissions plus rapidement. Mais ce volet fait également référence à des questions de justice climatique, notamment la nécessité de mettre en place le fonds pour les pertes et dommages promis lors de la COP 27, et d'intensifier les mesures d'adaptation.
Pourquoi est-ce important ?
En plus de placer la barre très haut en termes d'ambition, l'implication personnelle du secrétaire général des Nations unies donnera un élan politique indispensable sur des questions clés. Tout d'abord, en ce qui concerne les pertes et dommages, en convoquant une table ronde ministérielle peu après le sommet lui-même, et en incitant les dirigeants des institutions financières internationales à présenter la manière dont ils vont répondre aux pertes et dommages, conformément à la décision 2/CMA.4 (paragraphe 11) de la COP 27. Cela devrait permettre d'élever au niveau politique le travail technique effectué dans le cadre du comité transitoire pour établir le fonds et convenir de nouvelles sources de financement : les discussions pourront porter à la fois sur les options existantes (y compris les nouveaux instruments fiscaux) et sur les nouvelles taxes internationales invoquées lors du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial et du Sommet africain sur le climat à Nairobi.
Deuxièmement, en organisant une deuxième table ronde ministérielle sur les résultats politiques du Bilan mondial, un rendez-vous régulier prévu par l'accord de Paris pour faire le point sur l'état de l'action climatique dans tous les domaines et pour éclairer l'action future (y compris la série de CDN pour 2025). Il s'agira d'un premier moment de réflexion sur les messages essentiels issus du rapport de synthèse de la phase technique du Bilan mondial, notamment la nécessité d'éliminer progressivement les combustibles fossiles non réduits, et l'objectif ambitieux de tripler la capacité des énergies renouvelables au niveau mondial, approuvé dans la déclaration des chefs d'État et de gouvernement du G20.