Éditorial par François Lerin et Damien Conaré. Article de Laurence Tubiana, « Des services universels ? »
Les services ne sont pas des marchandises ou, pour le moins, ne sont pas des biens marchands comme les autres. Jusqu'ici, ils sont restés hors du cadre de la libéralisation des échanges qui s'est accélérée dans la phase actuelle de globalisation par le marché.
En creusant l'histoire des infrastructures et des services urbains, de leurs opérateurs et de leurs clients, et en parcourant les conflits et les contrats contemporains dans un plusieurs grandes métropoles du monde, on s'aperçoit que les dynamiques d'accès aux services sont inscrites dans des trajectoires chaque fois spécifiques.
Pourtant, les services de réseaux ont quelque chose d'universel. D'abord parce que ces branchements font largement partie des droits essentiels et que l'on considère généralement comme un défaut du contrat social qu'ils ne soient pas effectués. Il convient donc que le plus grand nombre ait accès à ces services.
Ensuite, parce que ce principe, qui vaut au sein d?une métropole, vaut aussi pour l'ensemble des métropoles du monde : 960 environ comptaient plus de 500 000 habitants en 2000, dont 22 de plus de cinq millions. De surcroît, pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, la population urbaine devrait atteindre 50 % de la population mondiale en 2007, soit plus de 3 milliards d'habitants. Dès lors, à l'échelle mondiale, comment penser ce gigantesque archipel urbain et ses réseaux matériels de services en d?autres termes que ceux du cosmopolitisme ou de l?universalité ?
Il est donc logique que des tensions apparaissent quand on cherche à établir un cadre international pour organiser les marchés de fourniture des services urbains : entre régulateur public et opérateur privé, entre société civile et firme multinationale et donc, ici comme dans d?autres endroits de la sphère publique, entre droit d'accès et efficacité économique.